Citation :
Le 09/05/2018 à 20:40, L`Eternel a dit :
Warhammer pose ses bases sur du med-fan classique, l'accapare, le transcende et redéfinit de nouvelles bases.
Il peut redéfinir autant qu'il veut, les bases resteront les mêmes.
Absolument pas. Quand GW sort les Kharadron Overlords, ce n'est pas une redéfinition des nains med-fan. L'archétype, ici, est la pierre d'antigravité (la même que dans Avatar ou Marvel), et que ce soit des nains qui l'exploitent, des elfes ou des trucs n'a aucune importance, le concept va juste piocher dans le Merveilleux Scientifique (pré-vernien), un imaginaire qui doit autant à Léonard de Vinci qu'aux auteurs extrapolant la Révolution Industrielle. Même sa sidérurgie n'est pas naine, que ce soit dans l'Histoire ou les mythes.
Les Idoneth Deepkin sont encore plus fumeux dans l'évolution archétypale, puisque c'est du TGCM pur, sans autre apport que des poissons "volants".
Le jdr par contre a posé des archétypes, que Citadel n'a fait que matérialiser en figs et dont GW n'a eu de cesse, pendant longtemps, de vouloir transformer en trademark (un peu comme ces multinationales prêtes à breveter une bactérie, une graine, une "race" bovine...) grâce à une position quasi monopolistique ("c'est du Warhammer", comme la fermeture est "Eclair").
L'assise de l'archétype med-fan a vraiment connu sa culture pop dans les années 60-70, et c'est d'abord une normalisation américaine (que GW ne fera qu'importer). Avant, cette reconnaissance codifiée était de l'ordre de l'architecture religieuse et de la recherche universitaire, ie touchait si peu de monde qu'on ne pouvait parler d'archétype (on trouve des nains ingénieux dans le panthéon égyptien comme les traditions africaines... Des hommes-serpents fourbes sont déjà dans le bestiaire sumérien quand GW n'y duplique, tardivement, que les précolombiens...).
Quand un code pictural devient un archétype, ie obtient une masse critique de population qui fait des associations automatiques entre une représentation symbolique et son "background" non-explicite, on peut y fonder une réinvention, qui altère donc l'une ou l'autre composante de cette association, sans la dénaturer.
Exemple, la sirène : créature séductrice féminine ailée et dotée de serres qui devient une créature séductrice féminine à queue de poisson. Même fonction, c'est juste une partie du code de reconnaissance qui se nuance : la prédatrice devient fuyante ; de céleste, elle vient maintenant des profondeurs, mais son chant reste identique et les sens visés les mêmes. Cette réinvention de la sirène a-t-elle marqué l'inconscient collectif comme l'étape de sortie de la Méditerranée vers la prégnance d'océans bien plus vastes, ou est-ce simplement par sa plus vaste diffusion que l'iconographie médiévale a fait oublier les textes antiques, comme le cinéma aujourd'hui fait oublier les livres ?
L'autre aspect qui me gêne dans cette discussion est le pré-supposé des mots. L'archétype méd-fan est d'abord une notion occidentale.
D'ailleurs Warhammer se garde bien d'incorporer quoi que ce soit qui vienne d'Asie ou d'Afrique. Les Ogres, Maneaters, sont passés des Huns (vision occidentale du barbare venu d'Asie) à la préhistoire mamouthienne ; ils restent des ogres, archétype anatomique du jdr, qu'il soit med-fan ou de type Shadowrun.
Ces archétypes ne dépassent pas l'atlantisme culturel, même si GW est diffusé en Asie où les archétypes sont différents, à commencer par leur traduction picturale, fonds de commerce de GW.
C'est dans l'impact colorimétrique que GW a une influence manifeste dans l'imaginaire occidental : la peau verte désormais synonyme d'orquoïde, le noir-violet des elfes noirs, le bleu azur des elfes hyperboréens... L'archétype est moins dans la figurine que dans les couleurs qui lui sont immédiatement associées pour la définir.
Un chinois verra des orques à armures jaunes comme des pornographes, des elfes noirs aux robes violettes comme des sages, les têtes vertes comme des créatures malades ou colériques, les rayures bleues-blanches comme signalant la folie...
Quand on a la tête dans les figs depuis longtemps, l'influence de GW est prodigieuse : sa permanence rétinienne devient la source de comparaison et il est facile d'inverser au profit de Lenton la source de l'archétype.
Il suffit pourtant du Rogue Trader qui va nous tomber dessus fin 2018 pour se rappeler que la créativité de GW n'a jamais été qu'une éternelle recomposition d'éléments superficiels, répétés cependant à l'envi pour en faire une norme : marier des uniformes napoléoniens à des culottes bouffantes médiévales, du Judge Dredd et des "techs" à tête à diodes directement sortis de Planète Interdite, c'est certes de l'art, mais ça ne réinvente pas un archétype de conquistador, ça ne fait que le rhabiller.